Une équipe d’archéologues de l’Inrap a mené une opération archéologique à Ittenheim (Bas-Rhin), sur prescription de l’État. Elle permet d’accéder à des vestiges très anciens, dont deux dents de lait d'un mammouth, datant du Paléolithique, soit entre 22 000 et 115 000 ans avant notre ère. Il est très rare d’étudier des vestiges de cette période qui correspond entre autres à celle de l’homme de Néandertal.

Dernière modification
09 mai 2022

Des méthodes exceptionnelles

Réalisée dans le cadre de l’aménagement de l’A355 (Contournement Ouest de Strasbourg) par Arcos, filiale du groupe VINCI, et d’un groupement public formé par l’Inrap et Archéologie Alsace, la fouille menée à Ittenheim nécessite des explorations archéologiques à plus de 7 mètres de profondeur. Les archéologues ont été ainsi en mesure d’accéder à des vestiges paléolithiques enfouis profondément. Très exigeante techniquement, l'opération archéologique a dû progresser par palier (en gradin) de manière à atteindre en toute sécurité les profondeurs souhaitées.

La période de transition entre l’homme de Néandertal et l’Homo Sapiens

Les niveaux sédimentaires sont principalement constitués de lœss, ces particules fines déposées par les vents au cours de périodes glaciaires, parfois sur plusieurs dizaines de mètres d’épaisseur. Leur étude est une source d’information pour restituer l’évolution de l’environnement au sein duquel ont évolué les hommes préhistoriques depuis leur arrivée en Alsace voici environ 600 000 ans.
La fouille permet de restituer les conditions environnementales présentes il y a environ 40 000 ans, alors qu’arrivait Homo sapiens dans la région et que l’homme de Néandertal disparaissait. Les chercheurs ont retrouvé des fragments d’os longs attestant de la présence de troupeaux de grands herbivores tels que le cheval, le bison et le mammouth durant cette période. Ces espèces constituaient une ressource et ont certainement été chassées par les hommes préhistoriques. L’étude de ces ossements  permettront de déterminer s’ils sont morts naturellement ou non. 
Les archéologues de l’Inrap ont retrouvé deux dents de lait de mammouth sur le site qui proviennent certainement du même animal. Les premières observations des dents permettent d’affirmer que l’animal avait moins de 3 ans et qu’il est mort violemment.

Un cadre chronologique de référence

En complément, des analyses géomorphologiques ont été initiées afin de restituer les processus de dépôts et d’érosion des lœss qui sont les indicateurs de périodes plus ou moins humides (sédimentologie, micromorphologie). L’étude des charbons de bois (anthracologie) et des différentes espèces d’escargots (malacologie) conservés dans les sols contribueront également à restituer l’évolution de la couverture végétale il y a plusieurs milliers d’années.
Les résultats de ces analyses permettront de mieux caractériser les différents dépôts de lœss et ainsi d’établir un cadre chronologique, stratigraphique et environnemental de référence pour la région. Cette fouille représente une rare opportunité de restituer l’environnement qui a été parcouru par les derniers hommes de Néandertal et les premiers Homo sapiens qui ont occupé la région, et de caractériser des niveaux beaucoup plus anciens atteints durant la fouille.

Aménagement : Arcos filiale du groupe VINCI et concessionnaire de l’autoroute du Contournement Ouest
Prescription et contrôle scientifique : Service régional de l’Archéologie (Drac Grand Est)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Sylvain Griselin, Inrap