À La Ciotat, une fouille de l'Inrap a permis d’étudier l’évolution des bâtiments du couvent des Ursulines, depuis leur installation au début du XVIIe siècle, et au-delà de leur départ à la fin du XVIIIe siècle.

Dernière modification
19 octobre 2022

Sur prescription de l’État (Drac PACA), l’Inrap a mené une fouille préventive à la Ciotat, boulevard Anatole France, de mai à août 2022. L’opération fait suite à un diagnostic réalisé en 2021 sous la direction d’Anne Richier. Menée en partenariat avec le Centre archéologique du Var (CAV), l’opération associe une recherche documentaire à l’étude des vestiges encore préservés. 

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Partie basse de la zone de fouille où se situent les restes de la chapelle des Ursulines.

© Charlotte Gleize, Inrap

L’étude des archives : un outil indispensable pour l’analyse

Discipline à part entière qui nécessite une connaissance approfondie des archives, l’étude documentaire vise à renseigner sur l’histoire et l’évolution d’un lieu à partir de sources écrites ou iconographiques (plan, illustrations, etc.).

Menée en parallèle de la fouille de l’ancien couvent des Ursulines, l’étude d’archives locales et nationales a permis d’identifier plusieurs documents susceptibles d’être confrontés aux faits archéologiques (destruction, reconstruction, etc.) pour aider à leur compréhension et à leur datation. Si la plupart de ces documents sont en cours d’étude, certains offrent déjà de précieuses informations. C’est notamment le cas de plans datant du XIXe siècle qui représentent l’îlot urbain englobant le couvent après sa désaffectation.

Les Ursulines à La Ciotat

Les Ursulines s’installent à La Ciotat en 1618, mais ce n’est qu’en 1635 qu’elles acquièrent des terrains à l’intérieur de la nouvelle enceinte, construite à partir de 1547.  Ce terrain est localisé en bas du coteau qui surplombe le littoral. Les textes indiquent que le couvent s’agrandit vers l’ouest au début du XVIIIe siècle. Vendu comme Bien National en 1795, il occupe alors la quasi totalité d’un îlot urbain.

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Plan de la ville de La Ciotat au XVIIIe siècle.

© BNF Estampes, H 112469

Le couvent

La fouille a mis en évidence l’existence de plusieurs constructions. La chapelle, réputée disparue, est pourtant partiellement conservée grâce à la réutilisation d’une partie de ses murs dans des constructions postérieures. Située au pied du coteau, elle se présente comme un édifice rectangulaire d’environ 10 m de large pour 30 m de long. Elle s’ouvre vers l’est sur un chemin courant le long de l’enceinte urbaine. Le mur nord est le mieux préservé ; il comporte un grand arc dont seule la base est préservée. Au nord est accolé un bâtiment qui s’ouvre sur un vaste jardin au centre duquel un puits a été mis au jour.

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Mur nord de la chapelle des Ursulines.

© Pascal Joyeux, Inrap

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Vue du mur nord de la chapelle des Ursulines, enchâssé entre les murs-béton de la gendarmerie du XXe siècle.

© Benjamin Michaudel, Inrap

La fouille du puits a été réalisée par la cellule d’intervention sur structures archéologiques profondes (CISAP), composée d’archéologues de l’Inrap spécialement formés à ce type d’intervention. La partie supérieure du comblement du puits a livré des éléments de démolition du couvent, tuiles et carreaux de sol notamment. Ils s’accompagnent de fragments de céramiques qui constituent vraisemblablement une partie de la vaisselle des religieuses. La partie inférieure a livré des restes végétaux (branchages, graines et noyaux) ainsi que les fragments d’un possible seau en bois.

Divers édifices complètent l’établissement, dont une partie seulement est localisée dans l’emprise de la fouille. Aménagés à flanc de coteau, les bâtiments étudiés sont de plain-pied avec la chapelle en partie basse, et forment un étage enterré en partie haute. Les constructions font l’objet de remaniements constants, qui réorganisent notamment les circulations en aménageant ou condamnant des portes entre les différentes pièces. On ignore la destination précise de ces pièces, mais il s’agit vraisemblablement d’espaces de service ; la fonction même des salles évolue, à l’image d’une cave transformée en citerne.

À l’ouest, une cour semble avoir fait l’objet d’un soin particulier. Elle parait mener depuis l’extérieur de l’établissement à l’aile principale du couvent, en évitant les espaces de service.

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Cour aménagée, vue du carrelage et négatif de l’escalier semi-circulaire.

© Sylvain Barbier, Inrap

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Le sol de la cour aménagée et le bouchage des deux portes d’accès au cloître.

© Sylvain Barbier, Inrap

 

La disparition du couvent ?

Les religieuses quittent l’établissement en 1792, et le couvent est vendu comme Bien National le 1er frimaire an IV (soit le 22 novembre1795) ; il est acheté par Jean-François Bonnaud. Le terrain est découpé en plusieurs parcelle dès les années suivantes. La similitude entre l’emprise de certaines de ces parcelles et celle des bâtiments du couvent laisse présager que ces derniers sont encore en élévation lors du découpage.

Dès 1825, les héritiers de Jean-François Bonnaud commencent à vendre les terrains. En 1834, le quart sud-est de l’ancienne emprise conventuelle est acquis par la commune. L’ancienne chapelle devient école et le terrain accueille une caserne qui déménage en 1866, permettant l’agrandissement de l’école.

Après diverses mésaventures, les parcelles constituant la moitié nord de l’ancienne emprise conventuelle sont progressivement acquises par la ville dans la première moitié du XXe siècle. L’école est alors reconstruite au nord-ouest des anciens terrains du couvent (actuelle école Louis Marin), tandis que l’angle sud-est accueille la gendarmerie, et l’angle nord-est la caserne des pompiers.

Le quart sud-ouest de l’ancien terrain du couvent resta quant à lui dans la famille Bonnaud jusqu’en 1924. Il est ensuite morcelé et vendu à divers propriétaires privés.

Les édifices appartenant au couvent disparaissent peu à peu au cours des transformations qui affectent les terrains. Toutefois, si la majeure partie des bâtiments de l’établissement religieux a aujourd’hui disparu, une des ailes du couvent est encore présente, désormais transformée en habitations.

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Vue de l’aile du cloître des Ursulines encore en élévation, dans le prolongement de la chapelle.

© Pascal Joyeux, Inrap

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Vue de l’arrière de l’aile du cloître des Ursulines encore en élévation.

© Pascal Joyeux, Inrap


Aménagement : SA Finareal
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac PACA)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Pascal Joyeux, Inrap