La “mise en scène“ funéraire

Il n’y a pas « un » modèle de tombe correspondant à l’âge du Bronze, mais une grande variété de formes selon les régions et les périodes, allant des chambres funéraires très élaborées (calages de pierres, coffrages de planches recevant le défunt…) aux sépultures plus modestes, limitées à un simple creusement sans aménagement ni couverture. Ce qui est certain, c’est que le retour de l’individu au centre des attentions funéraires donne clairement à voir les inégalités d’une société fortement hiérarchisée.

Une précieuse série d'indices

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Sépulture de la nécropole du Bronze ancien de Gerzat (Puy-de-Dôme) composée d’un dallage et d’un coffre en matériau périssable, dont les limites apparaissent en négatif. Les individus inhumés reposent le plus souvent la tête orientée vers le sud. La mise en scène du défunt et la construction soignée de la sépulture, supposant un investissement certain de son groupe, renvoie sans doute à un statut social privilégié.

La tombe offre un accès direct à l’individu qui y est enterré : l’analyse de ses ossements permet de connaître son sexe, son âge au moment du décès, l’alimentation ou les maladies qui ont marqué sa vie ; l’observation des soins dont il a fait l’objet dit non seulement sa puissance passée, mais bien souvent sa profession, ses origines.

 

Comme de bien entendu le ou les individu(s) inhumés au centre d’un tumulus sont plus riches et puissants que les habitants des modestes tombes qui l’entourent – du moins est-il commun de le penser. Leur fosse sépulcrale peut être entourée de parois en matériaux périssables parfois doublées de pierre, recouverte d’une dalle, quand la périphérie du tumulus est occupée par de simples trous en terre. 

 

Ensuite, la qualité des objets associés au défunt est essentielle pour se faire une idée de son statut. Les pendentifs en dents de suidés semblent par exemple réservés aux jeunes femmes adultes, comme les poignards le sont aux hommes de plus de trente ans ; les alènes ne se trouvent que dans les tombes féminines. La présence d’une enclume miniaturisée signalera que l’homme qui gît à côté d'elle pouvait être un artisan bronzier. Les fusaïoles, couteaux à moissonner, balances, hameçons, etc., décrivent une gamme d’activités pratiquées par les individus étudiés.  Sans surprise, la possession de biens rares confirme la position privilégiée de leurs détenteurs. Les colliers, bracelets, bagues, ceintures et jambières marquent la richesse de celle ou celui qui les porte.

Mais qu’en est-il des armes ? Si les épées et les cuirasses décorées, déposées dans quelques tombes prestigieuses, affirment le pouvoir d’une aristocratie naissante, que penser des haches et des poignards accompagnant de simples défunts ? Leurs propriétaires étaient-ils des guerriers ou des paysans armés parce que la vie quotidienne exigeait de pouvoir se défendre ?

Les objets symboliques

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Chariot en bronze et or de Trundholm (Danemark). Les zones humides (tourbières, marais, sources…) comme les rivières et les fleuves ont fait l’objet, au fil de l’âge du Bronze, de dépôts de pièces prestigieuses. Ce char découvert dans une tourbière de l’île de Seeland est daté de 1400 avant notre ère ; il réunit trois symboles majeurs de la nouvelle idéologie aristocratique, à savoir le cheval, le char et le soleil.

Parfois associés à des défunts, mais bien plus souvent retrouvés isolés ou au sein de dépôts, certains vestiges semblent revêtir une charge symbolique. La plupart sont en métal, ce qui a permis leur conservation, mais il en existait probablement d’autres, en bois, vannerie ou d’autres matériaux périssables, qui ne sont pas parvenus jusqu’à nous.

 

Les disques solaires et les rouelles prédominent (surtout dans la deuxième moitié de l’âge du Bronze). Selon qu’ils sont en or (massif ou plaqué), en bronze ou en cuivre, on peut supposer qu’ils avaient des statuts différents, les uns accompagnant des célébrations cultuelles, d’autres étant réservés aux puissants ou simplement utilisés par tout un chacun.

 

Le ciel (avec la course du soleil, de la lune et des étoiles), le char et le cheval sont parmi les grands thèmes récurrents, en quelque sorte emblématiques de la nouvelle aristocratie guerrière de l’âge du Bronze. Le chariot en bronze et or de Trundholm (Danemark) en est la plus belle illustration actuellement connue, à laquelle font écho des objets symboliques moins bien conservés découverts en France : paire de roues miniatures de Longueville, roues de Coulon, de Langres, de Fa ou de Rennes-les-Bains

 

Des instruments de musiques soit cliquetants soit à vent, ainsi que des vaisselles métalliques ou certaines armes  peuvent aussi appartenir à la sphère symbolique ou aux manifestations cultuelles. Il n’en reste pas moins que, sur ces questions, l’archéologue ne peut que faire des suppositions bien souvent sujettes à caution.