Au Plessis-Belleville, l'Inrap a mis au jour en 2020 un ensemble de vestiges (grands silos, nécropole, habitat) témoignant d'une occupation rurale, de type village ou hameau, qui semble s'être étendue du VIIIe au XIIe siècle. Retour sur cette découverte qui a permis de mieux comprendre l'histoire de cette commune.

Dernière modification
15 février 2021

Au Plessis-Belleville, en amont de la création d'un lotissement, une fouille a été prescrite par l'État sur une surface de 11 000 m2. Menée par l'Inrap, elle a permis de découvrir les contextes historiques et archéologiques de la commune et de ses communes limitrophes qui sont encore assez méconnus, alors que pour d’autres communes voisines, telles que Nanteuil-le-Haudouin ou Crépy-en-Valois, déjà largement prospectées, les prospections archéologiques attestent un développement bien antérieur à l’Antiquité. 

Les aménagements au Plessis-Belleville et dans la commune voisine de Lagny-le-Sec n’ont donné lieu à des fouilles et diagnostics que très récemment malgré un fort développement urbain. Quelques rares mentions existent dans différents ouvrages de toponymie de l’Oise dont la première est datée de 1082. Les écrits locaux évoquent, quant à l’origine toponymique, un ancien lieu entouré de palissades, et la proximité de voies romaines - la voie antique Paris-Soissons (actuelle RN2) et la voie Senlis–Meaux (actuelle N330) - est indéniable. Les fouilles réalisées à l’automne 2020 n’ont révélé qu’une petite partie d’une vaste et dense occupation médiévale.

Deux secteurs à vocation bien distinctes ont été observés : au nord, un secteur principalement réservé à l’espace funéraire regroupant une quarantaine de tombes et au sud, un secteur lié à l’habitat et à l’agriculture, caractérisé par de nombreux silos, plusieurs fosses, foyers et bâtiments légers sur poteaux dont un imposant bâtiment sur sablières et poteaux porteurs.

Le mobilier mis au jour, de même que la datation radiocarbone effectuée sur la sépulture fouillée, indiquent une occupation qui se situe entre le milieu du VIIIe et le XIIe siècle.

Un ensemble de silos de volumes inhabituels

Un très grand nombre de silos a été mis au jour sur le site, certains dépassant les volumes habituels connus pour ces périodes. En effet, si la profondeur moyenne de la grande majorité d’entre eux avoisine le mètre, plusieurs structures de très gros volume, dépassant parfois 2,50 m de profondeur, ont été observés, répartis un peu partout sur l’emprise de fouille. Leur profil tronconique ou cylindrique est remarquablement bien préservé et conserve une embouchure étroite pour la plupart, démontrant un rebouchage rapide après abandon. L’un d’entre eux contenait le squelette en place d’un jeune cervidé tombé ou déposé au fond de la structure immédiatement avant comblement.

La particularité qui saute aux yeux sur ce site, en ne perdant pas de vue que la fouille est loin d’être exhaustive, est l’absence ou quasi-absence de sectorisation des installations (probablement due aux différentes phases d’occupation) - hormis peut-être pour la nécropole -, la présence de silos ayant été observée en périphérie immédiate des tombes et au cœur de l’habitat, des tombes ayant été mises au jour également côté habitat.

D’après les premières observations, il semble que les silos soient associés par petits groupes de mêmes gabarits et profils, les plus petits ayant été observés au nord de la fouille et des structures de volume et dimensions supérieures dans la partie médiane et au sud de l’emprise. Les prélèvements effectués dans les niveaux conservés en vue d’analyses carpologiques permettront sans doutes de déterminer quelles étaient les plantes et céréales cultivées par les villageois du Plessis Belleville au début du Moyen-Âge.

La nécropole

Les sépultures occupent deux secteurs de la fouille. La principale concentration se compose de 38 tombes, localisées au nord de l’emprise, au nord du double fossé d’enclos qui segmente le site. Quatre d’entre elles ont été observées au sud de cet enclos. À ce stade, il est impossible de préciser la contemporanéité de toutes ces inhumations mais les recoupements stratigraphiques semblent indiquer au moins deux, voire trois phases successives. Elles suivent pour la plupart une orientation NO-SE et sont alignées, formant au moins cinq rangées parallèles, de part et d’autre d’un espace vide (espace de circulation ?). Cinq sépultures suivent une orientation différente NNE-SSO pour trois d’entre elle et ONO-ESE pour les deux dernières. Si l’âge et le sexe des défunts n’ont pas encore été établis précisément, des tombes d’adultes, d’adolescents et d’enfants ont été identifiées.

Les premières observations indiquent des inhumations sobres, en cercueil ou coffrage de bois et/ou en linceul, sans mobilier ni offrande, ce qui caractérise les pratiques funéraires du début du Moyen-Âge dès l’époque carolingienne. Certaines d’entre elles étaient aménagées à l’aide de calages de gros blocs de calcaire en place.

La fourchette chronologique, obtenue par analyse radiocarbone sur la sépulture fouillée lors du diagnostic, est comprise entre la deuxième moitié du VIIIe et la fin du IXe siècle. On peut formuler l’hypothèse d’une nécropole couvrant toute la période d’occupation du site, du VIIIe au XIIe siècle.

Trois sépultures isolées ont été découvertes au sud-ouest de la fouille, alignées les unes sur les autres selon une orientation NE-SO, probablement sans aucun lien avec la nécropole principale. Il s’agissait de deux sépultures d’enfants et d’un adolescent. Les rapports stratigraphiques indiquent qu’elles sont probablement postérieures à l’occupation majeure du site.

Sépulture d'enfant

Sépulture d'enfant

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Inrap

L’habitat

L’habitat proprement dit se concentre au sud du double enclos circulaire, matérialisé par des fossés parallèles. Dans un entrelacs de fosses, silos et poteaux, plusieurs bâtiments semblent se dégager. Il s’agit essentiellement de bâtiments légers à ossature de bois mais on observe également une construction plus imposante – peut-être à étage - s’appuyant sur des sablières basses maçonnées et soutenues par de large poteaux, profondément ancrés dans le sol. Situées à l’écart des bâtiments sur poteaux, dans la partie sud-Ouest de l’emprise, trois probables cabanes semi-excavées – dont la fonction est à ce jour indéterminée - ont été mises en évidence.

Bâtiment sur sablières

Bâtiment sur sablières

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Inrap

Le site a livré peu de mobilier archéologique comme c’est souvent le cas pour ces périodes. Le mobilier métallique est très peu représenté et concerne presque exclusivement les matériaux de construction (clous). Les éléments de parure et l’outillage sont quasi absents, de même que deux monnaies seulement ont été découvertes. La céramique et la faune constituent l’essentiel des artefacts prélevés avec plusieurs fragments de lissoirs en verre opaque.

Aménageur :  Nexity Foncier Conseil
Recherche archéologique : Inrap
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac des Hauts de France)
Responsable scientifique :  Karin Libert