Émissions de radio
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Mis à jour le
12 février 2024
Collection
Carbone 14

Pour découvrir l’archéologie d’aujourd’hui, ses sciences connexes, mais aussi approcher et décrypter ce que la discipline recouvre de concepts, de modèles, Carbone 14, le magazine de l'archéologie, retrace les avancées de la recherche française et internationale et parcourt terrains, chantiers et laboratoires. Une émission à écouter chaque samedi, de 19 h 30 à 20 h sur France Culture et à réécouter sur Inrap.fr.

Avec Jean-Loïc Le Quellec, anthropologue, directeur de recherche émérite au CNRS, spécialiste des images rupestres et Jean-Louis Georget, professeur en études germaniques à l'Université Sorbonne Nouvelle, directeur du CEREG et chercheur associé à l'EHESS (Centre Georg Simmel).

Tous les archéologues sont des explorateurs du passé, toutefois, certains, aux quatre coins du monde, ont aussi réalisé de lointaines expéditions.

Des arts doublement lointains

En Afrique, et durant tout le XXe siècle, des préhistoriens ont ainsi mis au jour d’étonnants corpus d’art rupestre, peintures ou gravures fixées sur des parois rocheuses, notamment du Sahara et d’Afrique Australe.

Leurs dessins, croquis, relevés sont alors devenus des éléments indispensables pour révéler au public, ces arts doublement lointains. Aujourd’hui, la France et l’Allemagne possèdent, dans leurs musées, les plus grandes collections de dessins d’archéologues.

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Le préhistorien français Henri Breuil (au milieu) observe le panneau des aurochs dans la salle des taureaux de la grotte de Lascaux en 1948 à Montignac (24) © AFP - © Archives AFP

Henri Breuil, l’art du relevé

Henri Breuil est sans conteste le précurseur de l’étude de l’art rupestre. Il en fonde aussi la méthodologie, préférant le dessin et la cartographie des parois à la photographie. « Ce n’est pas en laboratoire que l’art rupestre s’apprend, mais sur le terrain. C’est un sujet que l’on ne peut saisir qu’à la condition de procéder aux relevés soi-même, d’avoir vécu en tête à tête avec les images pendant des heures, des jours, voire des semaines » (Lhote 1962 à propos de Breuil). Dans une vision mystique, l’abbé magnifiera cet art, au travers de ces relevés.

Le Tassili n’Ajjer d’Henri Lhote

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Henri Lhote relevant, expédition Lhote, Tassili n'Ajjer, Algérie, 1956-57 - © MNHN / J.-C. Domenech

Dans les pas d'Henri Breuil, Henri Lhote recensera, au travers de plusieurs expéditions, l’art du Tassili central ; il est alors accompagné dans cette quête par de jeunes peintres qui ont en charge de reproduire les images préhistoriques. Relevées à l’aide de calques, les œuvres préhistoriques sont ensuite reproduites à la gouache.

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Girafes avec antilopes et autruche, relevé d'Henri Lhote à Ouan Abou, expédition Lhote en Algérie, 1957 - © MNHN / J.-C. Domenech

Pour mieux convaincre le public de l’importance de cette préhistoire, ces fac-similés, nouvelles œuvres d’art, furent exposés en 1957, au Musée des Arts décoratifs à Paris, tandis que son ouvrage À la découverte des fresques du Tassili (1958) fut un succès maintes fois réédité. Henri Lhote percevait des liens entre art saharien et Égypte ancienne. Quatre petites femmes à tête d’oiseau du site de Jabbaren en étaient l’affirmation. L’archéologie sait désormais qu’il s’agit de faux, œuvres potaches d’un des jeunes peintres de la mission.

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Chasse à l'antilope, expéd. Lhote, Tissoukaï, Algérie, 1960 / Expéd. Lhote et mise en peinture, expéd. Lhote, Tassili n'Ajjer, Algérie 1956-57 - © MNHN, J.-C. Domenech - Labo Préhistoire

Un archéologue excentrique Léo Frobenius

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Portrait de Léo Frobenius réalisé par son frère aîné, Hermann Frobenius en 1924 (Toile exposée à l'Institut Frobenius à Francfort-sur-le-Main, Allemagne) - © S. Chapron

Ethnologue autodidacte, peu connu en France mais capital en Allemagne, Leo Frobenius entreprend une douzaine d’expéditions en Afrique entre 1904 et 1935. Celui-ci conteste les bases idéologiques du colonialisme et prône l’historicité des cultures africaines ; en cela, il est un des inspirateurs des théoriciens de la négritude. (cf. Histoire de la civilisation africaine, 1936). Parallèlement, il développe la fameuse - et très fumeuse - théorie de l'Atlantide africaine, reliant le continent au monde hellénistique. C’est par la préhistoire que celui-ci aborde l’Afrique.

Issues de l’Institut Frobenius, premier fond d’art préhistorique au monde, les œuvres de cette mission sont présentées par le Musée de l’Homme, dans une très esthétique exposition "Préhistomania". Des œuvres et relevés d’art préhistorique du Zimbabwe, d’Afrique du Sud et du Lesotho, mais aussi d’Italie et de Libye, réalisés par ses dessinateurs et dessinatrices, entre documents scientifiques et création artistique contemporaine.

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Elisabeth Pauli et Katharina Mart, Expédition de Leo Frobenius à El Ghicha, Aflou, Algérie, 1935 - © Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main

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Silhouettes de mains et pieds, Relevé d'Albert Hahn, Papouasie, 1937 / Elisabeth Pauli, Ain Dua, Uweinat, Libye, 1934 / Joachim Lutz, Ruchera, Zimbabwe, 1929 - © MNHN / J.-C. Domenech / Institut Frobenius, Francfort-sur-le-Main

>> Exposition Prehistomania au Musée de l'Homme, du 17 novembre 2023 au 20 mai 2024. Présentation vidéo.

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Affiche de l'exposition - © Musée de l'Homme / MNHN

À lire : Relevés d'art préhistorique : ces documents "sont parfois les uniques témoignages d'œuvres disparues"
À lire aussi : Exposition Arts et Préhistoire au Musée de l'Homme

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Enregistrement de l'émission au Musée de l'Homme, devant les relevés de G. Bailloud. De gauche à droite, J.-L. Georget, V. Charpentier et J.-L. Le Quellec - © S. Chapron

Pour aller plus loin

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Restauration du relevé d'Henri Lhote n° 22 pour l'exposition - © MNHN - N. Krief

Année :
2024
Durée :
29 min
Année :
2024