La Vénus de Lespugue, à l'origine de la quintessence des formes

L'émission Carbone 14 ouvre cette nouvelle saison radiophonique avec un chef-d’œuvre de la Préhistoire française, et retrace l’histoire d’une grande dame, la Vénus de Lespugue.

Tout juste centenaire, née le 9 août 1922, non loin de Saint-Gaudens (Haute-Garonne), dans une commune aujourd’hui peuplée de 83 habitants, Lespugue, la "dame de Lespugue" est un summum de l’art préhistorique - Pablo Picasso y verra d’ailleurs « la quintessence des formes féminines, l’origine de tout » - conservée aujourd'hui au musée de l’Homme.

Cette sculpture en ronde-bosse d’environ 15 centimètres de hauteur est taillée dans l’ivoire d’une défense de mammouth. Son découvreur, René de Saint-Périer, évoque « le dessin général est symétrique : il s'inscrit dans un losange presque équilatéral » qui, aujourd’hui, en fait une œuvre presque cubiste !

Depuis un siècle, la Vénus n’a laissé indifférents ni ses visiteurs, ni les archéologues. Ainsi, André Leroi-Gourhan disait d’elle que « les reins, les fesses et les cuisses sont figurés, avec un mépris flagrant de la réalité », sorte « d’hérésie anatomique ». Yves Coppens, dans les pas de Georges-Henri Luquet, propose, quant à lui, que la Vénus, composée de losanges soit double, et que retournée les pieds figurent une nouvelle tête.

Un dernier coup de pioche pour une dérisoire et sublime entrée en scène

Le 9 août 1922, un dernier coup de pioche dans la grotte et c’est la catastrophe, « dérisoire et sublime entrée en scène d’une déesse, à l’aube des arts ». La Vénus fut bien entendu immédiatement restaurée et cela même si quelques fragments ont été perdus à tout jamais. Pour mieux comprendre ce chef-d’œuvre de 23 000 ans, une nouvelle restauration vient d’être entreprise et a permis de découvrir qu’elle fut recollée sur une tige de fer !

>>> Ne manquez pas l'exposition Arts et Préhistoire, qui se tiendra du 16 novembre 2022 jusqu'au 22 mai 2023 au Musée de l'Homme, et présentera des chefs-d’œuvre de l'art préhistorique venus du monde entier, dont la Vénus de Lespugue.

Pour aller plus loin

• Pages wikipédia et du CReAAH (Centre de Recherche en Archéologie, Archéosciences, Histoire - CNRS) de Cyril Marcigny.
• Publications de Cyril Marcigny (site Academia/Inrap).
• Page de Claude Mordant (site du Comité des Travaux Historiques et Scientifiques (CTHS) rattaché à l'Ecole nationale des Chartes).
• Page wikipédia de la Vénus de Lespugue, et celle du Muséum National d'Histoire Naturelle.
• Page wikipédia de la grotte des rideaux où a été découverte la Vénus dans les gorges de la Save, en Occitanie.
• Site personnel de Nathalie Rouquerol, préhistorienne, auteure, avec le sculpteur Fañch Moal de La Vénus de Lespugue révélée, regards croisés (Editions Locus solus, 2018).
• Article de Pierre Barthélémy, La Vénus de Lespugue, star de la préhistoire (Le Monde, Août 2021) - intégralité de l'article réservée aux abonnés.

Références citées

• La grotte de Cussac (cf. émission en écoute en bas de page) - site du Ministère de la Culture et du Musée d'Archéologie Nationale (MAN). 
• Page wikipédia de René de Saint-Périer, et page du couple Suzanne et René de Saint-Périer (site du Musée d'Archéologie Nationale de Saint-Germain en Laye), découvreurs de la Vénus.
• Article sur le couple Saint-Périer, (Le Parisien, décembre 2012).
• La Dame de Brassempouy (ou Dame à la capuche), site de statues préhistoriques dans les Landes. Page wikipédia de la Dame de Brassempouy.
• Constantin Brancusi, sculpteur roumain (1876-1957) dont certaines oeuvres semblent inspirées par la Vénus.
• Page wikipédia de Sarah Baartman (1789-1815), appelée également la Vénus Hottentote.
• Page wikipédia d'André Leroi-Gourhan (1911-1986), ethnologue.
• Page wikipédia d'Yves Coppens (1934-2022), paléoanthropologue, professeur émérite au Muséum national d'histoire naturelle et au Collège de France.