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Un habitat et son réseau souterrain du premier Moyen Âge à Distré (Maine-et-Loire)
Une équipe de l’Inrap a mené une fouille sur une surface de 2 hectares dans le secteur sud de la ZAC de Champ Blanchard à Distré. L'opération a livré de nombreux vestiges relevant de la sphère domestique et d' activités agro-pastorales, datant de la fin du haut Moyen Âge, ainsi qu'un réseau souterrain.
Vestiges d’un habitat du Xe - XIIe siècle
Le site prend place dans un territoire densément occupé autour de la fin du premier Moyen Âge qu’illustrent les nombreuses découvertes d’habitats réalisées ces dernières décennies dans cette partie du Saumurois. L’occupation mise au jour est matérialisée par un enclos fossoyé de près de 3000 m², dont l’accès se faisait depuis l’est, par une interruption du tracé du fossé.
Vue générale du chantier de fouille.
© Pierrick Leblanc, Inrap
L’habitat se situe presque en position centrale dans l’enclos. Partiellement fouillés, les vestiges indiqueraient au moins deux états dans l’aménagement du bâtiment, le premier sur poteaux, le second fondé sur solin, l’ensemble couvrant une surface d’environ 50 m².
Une trentaine de silos sont répartis dans l’enclos, isolés ou groupés autour de l’habitat. Ceux isolés enregistrent d’importantes capacités d’ensilage, avec des profondeurs proches de 2 m. Les autres ont des capacités moindres mais néanmoins conséquentes. Les besoins en stockage sont complétés par une vaste pièce excavée de 25 m², du type cave.
L’intervention de la Cellule d'intervention sur les structures archéologiques profondes (Cisap) de l’Inrap a permis la fouille manuelle et exhaustive du seul puits à eau identifié sur le site. Profond de 11,85 m, les comblements ont livré du mobilier céramique et de nombreux restes organiques, parmi lesquels les douelles et les fonds d’au moins deux seaux, ainsi que de nombreux restes carpologiques. Les prélèvements sédimentaires réalisés permettront de renseigner l’environnement naturel du site.
Vue du puits à eau après fouille.
© G. Roy, Inrap
Le mobilier est peu abondant. Les tessons de céramique illustrent une vaisselle à usage domestique (pots à cuire) et au stockage. Le mobilier métallique est presque absent. En revanche, le lot de faune est très important en raison de nombreuses carcasses de bovins mises au jour dans les silos. Leur rejet a nécessité au préalable leur démembrement. Les observations permettent d’envisager l’illustration d’un épisode d’épizootie ayant touché le cheptel, hypothèse qu’il conviendra d’étayer par des analyses complémentaires et notamment parasitologiques.
Silo avec trois carcasses de bovins démembrés.
© C. Bossard, Inrap
Un réseau souterrain important lié à l’habitat
De l’édifice, une descenderie permet d’accéder à un réseau souterrain qui se développe sur plus de 50 m linéaires. Fortement encombré de matériaux infiltrés par les puits de creusement connectés à la surface, il n’a pas été désobstrué lors de la fouille, bénéficiant d’une mesure de protection archéologique ; son emprise réelle est celle relevée à partir des espaces vides de remblais. Il se compose d’au moins cinq salles reliées par des galeries permettant une circulation debout. La morphologie des salles leur confère un espace utile important, probablement dédié au stockage des denrées.
Auge souterraine.
© G. Roy, Inrap
Des aménagements spécifiques permettent de contraindre la circulation et de clore tout ou partie de l’ouvrage. La présence d’une auge avec un anneau de fixation indique également la stabulation, probablement ponctuelle, de petit bétail. De nombreuses cavités ont été creusées dans les parois des salles afin d’équiper l’espace de dispositifs d’éclairage et de divers systèmes de suspensions. D’autres aménagements renvoient à la nécessité de défendre les lieux en contraignant la circulation (étroitures) ou en permettant de clore tout ou partie de l’ouvrage.
Galerie souterraine avec étroiture à l’arrière-plan.
© G. Roy, Inrap
À l’issue de la phase de terrain, la caractérisation du statut du site et de ses occupants reste posée. Une seule unité d’habitat semble occuper l’emprise fouillée mais les capacités de stockage dépassent largement les besoins quotidiens d’une famille. L’hypothèse d’une occupation dédiée à la collecte des productions de plusieurs exploitations agricoles peut donc être émise, ainsi que sa dépendance envers un propriétaire foncier, laïque ou ecclésiastique. La présomption d’un abandon du site directement lié à une épidémie affectant le cheptel bovin est également pressentie. Les études spécialisées à venir tenteront de répondre à ces problématiques.
Contrôle scientifique : Service régional de l’archéologie (Drac Pays de la Loire)
Recherche archéologique : Inrap
Responsable scientifique : Gwenaël Roy, Inrap